Le samedi 24 novembre, s’est tenu une Assemblée des délogé·es à l’appel du collectif du 5 novembre – Noailles en colère, qui a adoptée une plateforme de mesures d’urgences reproduite ci-dessous.
La première Assemblée des délogé·es de Marseille, tenue le samedi 24 novembre à l’appel du Collectif du 5 novembre – Noailles en colère, dénonce et s’alarme de la psychose organisée par les pouvoirs publics et du non-respect des droits des personnes délogées. Elle se déclare solidaire de tou·tes les délogé·es et appelle à la vigilance citoyenne concernant les évacuations et les relogements des habitant·es. Nous mettrons pour cela en œuvre les moyens d’action nécessaire et portons les revendications suivantes.
Nous appelons tou·tes les personnes délogées à se saisir de ces revendications et à défendre nos droits collectivement. Nous demandons au vu de la situation exceptionnelle et dramatique à ce que ces mesures soient appliquées sans distinction de secteur (secteur dit du drame ou non), de statut d’occupation, de revenu ou de nationalité. Les bailleurs doivent être tenus de respecter leurs obligations, avec un soutien des pouvoirs publics si nécessaire. Les pouvoirs publics doivent assurer un soutien équivalent pour les propriétaires occupant·es. Nous porterons ces revendications dès aujourd’hui et publiquement auprès de la Mairie, de la Préfecture, de la CAF, les entreprises d’énergie du Conseil départemental et du Conseil régional (que nous nommerons « pouvoir publics » dans ce document). Nous exigeons d’être reçus par les services techniques et élu·es compétents.
1. Concernant la gestion catastrophique de la crise actuelle et la psychose organisée par les pouvoirs publics, nous exigeons immédiatement l’arrêt des expulsions manu militari tel qu’elles ont lieu actuellement et l’organisation d’un véritable plan d’expertise et de protection des habitant·es qui soit transparent et sérieux, à travers les mesures suivantes :
- La délivrance de toutes les arrêtés de péril ou d’insalubrité et des expertises dès l’évacuation. La communication aux concerné·es et la publication de l’ensemble des arrêtés et rapports d’expertise concernant les immeubles. Que les pouvoirs publics assurent le remboursement du loyer de la période concernée s’il s’avère qu’aucun arrêté de péril ou d’insalubrité n’est publié in fine.
- La mise en place de contre-expertises indépendantes sur demande des habitant·es.
- Des expertises immédiates sur l’ensemble des immeubles déjà évacués
- La planification, quartier par quartier et en particulier autour du pâté de maison du 63-65 rue d’Aubagne, des expertises et contre-expertises. Ceci afin de permettre de rassurer la population et d’assurer la transparence de cette gestion de crise.
- Des moyens humains conséquents pour assurer ces expertises. L’Etat doit ici être à la hauteur du caractère exceptionnel de la situation et reconnaitre officiellement le caractère exceptionnel de la situation actuelle.
- Une procédure systématisée et transparente pour la justification des évacuations, avec explication en direct et officielle de la situation des habitant·es et de l’immeuble concerné.
- Que les habitant·es puissent être averti·es la veille des évacuations lorsque le péril imminent n’est pas avéré et que les personnes délogées puissent récupérer leurs effets personnels dans les plus brefs délais.
- Une procédure systématisée, officielle, publique et transparente, du suivi des délogé·es, afin que chacun·e ait connaissance de ses droits.
- Que des agent·es compétent·es en matière d’accès aux droits, de logement et de gestion de crise soient affectés par l’Etat au guichet unique, et non des agent·es municipaux qui malgré leur bonne volonté ne sont pas formé·es à ces tâches.
- Des aides financières ou une prise en charge par les pouvoirs publics du relogement des habitant·es lorsque les propriétaires ne sont pas en capacité financière de le supporter.
- Un contrôle citoyen à travers la participation des associations spécialisées et collectifs d’habitants à un véritable comité de pilotage de la gestion de cette crise.
- Qu’aucune évacuation ne puisse avoir lieu sans mise en place des mesures suscitées
- Une communication officielle et transparente sur les recherches exploratoires en cours, l’état des canalisations et les travaux autour du 63-65 rue d’Aubagne.
- L’installation d’une cellule psychologique dans le quartier de Noailles
- La prise en charge des réparations induite par les sondages destructifs parfois opérés dans le cadre du diagnostic ou des expertises
- La régularisation exceptionnelle de toutes les personnes sans-papiers concernées par les délogements afin de leur assurer des droits égaux avec les autres délogé·es.
- La suspension et non la résiliation des contrats d’énergie.
2. Concernant le relogement provisoire des délogé·es, nous exigeons dès maintenant l’amélioration de la prise en charge des besoins de première nécessité et l’amélioration des conditions d’accueil et de vie quotidienne des délogé·es à travers :
- L’installation d’annexes du guichet unique, d’un accompagnement et d’un suivi social, psychologique et sanitaire au plus près des hôtels.
- La prise en compte des régimes spécifiques dans les repas délivrés aux délogé·es
- La mise en place de partenariat avec les associations locales et les restaurateurs locaux plutôt qu’avec la Sodexo afin que les délogé·es aient accès à des moments de repas conviviaux et faire vivre le tissu économique local
- Le service de repas chaud à l’intérieur des hôtels et l’attribution de tickets restaurants pour les repas du midi et du soir.
- L’accès à des produits d’hygiène, d’entretien et de bon pour les blanchisseries
- Un planification claire et une accélération du processus de relogement
- L’anticipation des nuitées d’hôtel pour les délogé·es afin qu’ils et elles ne soient plus dans l’incertitude permanente.
- La réorganisation des chambres d’hôtels afin que les familles qui ont été séparées à plusieurs chambre d’écart puissent être regroupées
- L’arrêt des réquisitions de gymnase
- Le maintien des nuitées d’hôtels entre la signature du bail et l’aménagement
3. Concernant le relogement définitif s’il a lieu d’être et le suivi des délogé·es dans les semaines et mois à venir, nous nous assurerons que les moyens mis en œuvre soient exceptionnels et que tous les délogé·es aient accès aux mêmes dispositifs. Nous exigeons :
- Que les bailleurs privés et publics soient mis devant leurs responsabilités et obligations en termes de relogement et suivi des délogé·es
- Qu’un conventionnement soit mis en place si nécessaire entre les personnes délogé·es, les pouvoirs publics et les bailleurs, afin de s’assurer qu’ils aient le droit au retour, c’est-à-dire à réintégrer leurs anciens appartements si des travaux y ont lieu. Que les personnes délogées soient informées dès la mise en place de la procédure de relogement de ce droit au retour et que celui-ci puisse être effectif y compris sur les travaux durent longtemps.
- Que les aides financières qui seront attribuées le soient à condition d’une mise sous gestion des logements par des associations mandatées, afin d’assurer que les loyers n’augmentent pas.
- Une accélération des procédures de relogement, avec planification et transparence sur le processus-type et les droits des personnes délogées
- Que l’accès au logement social se fasse sans conditions de revenus ou de nationalité et de façon prioritaire pour tou·tes les personnes délogées
- Que les premières propositions faites aux délogé·es soit systématiquement dans leur secteur d’habitation originel
- Que celles-ci soient a minima de typologies comparables aux anciens appartements et correspondent aux besoins des personnes.
- Qu’aucun sur-loyer n’ait à être payé par les habitant·es
- Que les frais de déménagement, de stockage des effets personnels et meubles si nécessaire, et d’ameublement soient pris en charge dès signature du bail, soit par l’octroi de bons d’achats soit par le remboursement sur facture pour les personnes ayant déjà déménagé.
- Que la puissance publique débloque des fonds exceptionnels et que toutes les personnes délogées y aient accès sans conditions de ressources.
- Que les pouvoirs publics se portent cautions si nécessaire
- L’accès aux mêmes droits pour les propriétaires occupant·es et les locataires, en faisant en sorte que la puissance publique assure les propriétaires de l’accès à ces dispositifs en lieu et place du rôle des bailleurs avec leurs locataires, notamment afin qu’ils n’aient pas à débourser un loyer en plus de leurs crédits.
- Que les personnes délogé·es habitant·es dans le périmètre « drame » ou non aient accès aux mêmes dispositifs et droits
- L’amélioration de la communication des agences et sociétés en charge du relogement et les services de la rue Beauvau, afin que les dossiers des personnes délogées soient transmis directement
- Que les services de la CAF s’impliquent dans ces dossier afin d’éviter toute interruption des APL/ALS ou retard dans leur remise en place.
- Des fonds exceptionnels pour compenser les pertes financières des commerçant·es.
- La prise en charge par les pouvoirs publics des frais induits par les évacuations des personnes dont les immeubles ne sont pas en péril ou insalubres.
4. Afin de mettre en place ces mesures, nous exigeons de que les moyens suivants soient mis en œuvre. Il semble impossible d’améliorer la situation et d’assurer les droits des personnes délogées et la résorption de l’habitat indigne sans cela.
- L’intervention de l’Etat afin de mettre à disposition les moyens humains et financiers nécessaires
- Que l’ensemble des fonds de solidarité et d’urgence soient activés immédiatement
- La constitution d’un comité de pilotage réunissant l’ensemble des collectivités territoriales, l’Etat et les collectifs et associations des habitant·es et des délogé·es.
- Qu’un comité de pilotage constitué des mêmes acteurs soit mis en place concernant l’avenir du quartier de Noailles, de la rénovation des logements évacués dans tout Marseille et l’avenir du terrain des immeubles effondrés et déconstruits, avec la possibilité d’un référendum populaire pour décider du projet à y mettre en place.
- La réquisition des logements vides, la préemption des logements qui peuvent l’être et leur transformation en logements sociaux accessibles aux foyers à bas revenus
- Qu’un local soit attribué aux associations et collectifs d’habitants
Nous réclamons enfin des réponses immédiates et la mise en œuvre de la plate-forme de mesures d’urgence (10 novembre) du collectif du 5 novembre et des associations intervenant sur les questions de logement (8 novembre) afin d’assurer la résorption de l’habitat indigne et dégradé et l’accès à un logement digne pour toutes et tous. Nous exigeons que ces réponses soient faites immédiatement et publiquement afin que l’ensemble des citoyen·nes puissent en être informé·es. Les délégué·es de l’Assemblée des délogé·es et le Collectif du 5 novembre porteront publiquement ces revendications auprès de la population et des pouvoirs publics. Nous mettrons également en œuvre les moyens d’une vigilance citoyenne sur les évacuations et sur la résorption de l’habitat indigne et dégradé.